Wolfgang et Simon, deux entrepreneurs « prêts à cuisiner » pour la Chine

• 26 mars 2015

Après le « prêt à manger », le « prêt à cuisiner »

Que ferait-on aujourd’hui sans les restaurants à l’emporter ? Non, c’est vrai ; qu’on adore cuisiner ou qu’on gémisse à l’idée de devoir soi-même dorer sa galette de rosti, on a tou-te-s déjà craqué pour un plat à l’emporter. Un frigo vide ou une longue journée de travail après laquelle se faire à manger paraît un ultime effort insurmontable suffisent à se dire : « Bon aller, ce soir je commande une pizza, un kebab, un plat chinois, un couscous, etc… »

Mais une fois notre estomac – et notre poubelle avec ses emballages – bien rempli(e), on se dit souvent : « Mouais… Franchement c’était pas top ce “takeaway“ ». Le plat est un peu froid ; les légumes sont pâteux ou mal cuits ; on n’a aucune idée ni de la provenance des produits ni de leurs valeurs nutritives ; on ne sait pas trop ce qu’on mange ? Effectivement, les mêmes constats se répètent souvent…

Ces constats, Simon Vogel et Wolfgang Illing n’ont pas voulu les accepter. Parce qu’aujourd’hui, finalement, on a le choix entre « la qualité de sa propre cuisine » et « la facilité du plat à l’emporter pas vraiment bon ni sain ni appétissant ».

Alors pourquoi ne pas changer de paradigme et proposer, non pas un repas « prêt à manger » ou « prêt à réchauffer » – dont la procrastination culinaire résultante nous semble un avantage – mais plutôt un plat « prêt à cuisiner » qui fournit les ingrédients déjà apprêtés et la recette appropriée ?! C’est l’idée des deux entrepreneurs qui sont partis à l’assaut du marché chinois dans le domaine du « food delivery ».

Family Dinner

« Simon, Wolfi, 侬好 ! » (« Simon, Wolfgang, bonjour ! » en shanghaien)

D’un côté, on a Simon, Suisse romand, 28 ans. Issu d’une famille de professeurs qui enseignent les sciences « dures », il a pris l’habitude, depuis qu’il est tout petit, de parler biologie et chimie autour de la table à manger. C’est donc avec entrain qu’il se lance en maths et physique lors de son arrivée au Gymnase de Marcelin, à Morges.

Une fois sa maturité en poche, il décide de partir, sac sur le dos, pour l’Australie, un voyage organisé avant la poursuite de ses études initialement prévues en Suisse, à l’EPFL. C’est au pays des steaks de kangourous que Simon a une révélation et découvre une vraie passion : manger, boire et (re)manger ! De retour en Suisse, il troque alors ses tongues et sa planche de surf pour les bancs et les cahiers de l’EHL, l’Ecole hôtelière de Lausanne. Bienvenue au Chalet-à-Gobet ! Il obtient son bachelor en « Hospitality Management » avec succès durant l’été 2011 et débute une carrière professionnelle dans un prestigieux hôtel de Doha au Qatar quelques mois plus tard.

De l’autre côté, on a Wolfgang, Allemand d’origine (on pouvait s’en douter avec un nom si fameux) qui, dès ses 16 ans, part étudier une année en Thaïlande puis aux États-Unis pour y obtenir son bachelor en hôtellerie et restauration.

Mais il prend alors conscience que le programme universitaire local n’est pas à la hauteur de ses attentes et réalise que la Suisse se positionne comme un pays leader dans le domaine de l’accueil. Il rejoint alors les rangs de l’EHL où il rencontre celui qui deviendra quelques années plus tard son collègue de travail à Doha, puis son associé à Shanghai.

shanghai

« Saucepan » : le resto qui frappe à votre porte

C’est justement à travers un voyage à Shanghai en Chine que Simon, qui vient y retrouver son frère, tombe amoureux de la New York asiatique dans laquelle il trouve le dynamisme et les attraits économiques nécessaires au lancement d’un nouveau projet !

Après de longues discussions, nos deux acolytes, Simon et Wolfgang, décident de mettre leur carrière – pourtant prometteuses – entre parenthèses et prennent un aller simple depuis le Moyen-Orient pour la Chine afin d’y développer leur entreprise de restauration.

Mais plusieurs problèmes se posent d’emblée. Loyers beaucoup trop chers par rapport à leurs économies, énorme compétitivité dans le secteur des services de restauration rapide, difficultés à entrer dans le monde des affaires chinois, barrière culturelle dédoublée à cause de la langue,… le risque est jugé trop important.

C’est pourquoi ils décident de réadapter leur projet. « Au lieu de faire venir les gens au restaurant, on a décidé d’amener le restaurant chez eux ! Le concept est de faire de la « Prep », c’est-à-dire de mettre en place tous les ingrédients nécessaires à l’élaboration d’un plat garantissant le maximum de fraîcheur, le tout, avec le minimum de temps et d’effort passés en cuisine. La valeur ajoutée que nous apportons avec notre produit se base sur un contrôle tout au long de la « supply chain » et non uniquement lors de la livraison des plats. » 

chine

Un concept innovant pour ouvrir un nouveau marché

« Saucepan » (ou casserole en français) est aujourd’hui composée d’une petite équipe d’entrepreneurs répartie entre Paris, Shanghai et les USA. Le projet est encore à ses balbutiements mais nos initiateurs prévoient une levée de fonds pour développer le concept dans plusieurs grandes autres métropoles en Asie, et, pourquoi pas, en Europe.

Même s’ils sont enthousiastes, les jeunes entrepreneurs ont aussi appris la patience. Car même si l’anglais est devenu la langue internationale, quand tu es en Chine et que tu ne parles pas un mot de mandarin… c’est parfois la galère.

« La Chine est un pays où tu peux avancer d’un pas mais reculer de deux. Il est important de ne jamais oublier que c’est à toi de t’adapter au pays et non l’inverse. »

Malgré ces premiers obstacles financiers et culturels, les deux entrepreneurs n’ont pas lâché l’affaire, sûrs du potentiel de ce nouveau marché. En plus, la Chine et la Suisse ont récemment signé un accord de libre échange qui, selon nos deux acolytes, fait du plus grand pays d’Asie un marché plus qu’intéressant qui regorge d’opportunités pour les entrepreneur-se-s suisses.

Simon, Wolfgang, des conseils pour faire avancer la Suisse ?

En tant qu’entrepreneurs, les deux amis soutiennent tout naturellement les initiatives lancées par la Suisse dans le développement de l’entrepreunariat – national ou international –, des échanges multiculturels et la pratique de stages à l’étranger.

Mais, selon eux, la Suisse devrait avancer dans les deux sens. Si les Suisse-sse-s peuvent être fier-ère-s d’exporter leur savoir et  promouvoir leur modèle socio-économique à l’étranger, « ouvrir la porte et faciliter encore plus l’intégration de personnes étrangères dotées d’un savoir-faire qui puissent faire avancer le pays dans la bonne direction nous paraît essentiel. »

Et la Suisse, elle vous manque ?

C’est clair, quand on voit le nombre de pays et de kilomètres déjà parcourus… la question est peut-être mal posée. Quand on vit pendant des années dans de grandes métropoles comme Doha, Sydney, Bombay ou Le Caire, même Zurich, Genève et Lausanne passent pour des villages de campagne. Mais Simon et Wolfgang paraissent néanmoins toujours fortement attachés à la Suisse – et sa campagne.

« Nous sommes conscients de toutes les qualités qu’offre ce pays en or. A travers nos différents voyages, la plupart des personnes que nous avons rencontrées ne comprenaient pas pourquoi nous quittions la Suisse pour aller travailler et nous installer ailleurs. Il était toutefois important pour nous de nous développer personnellement et professionnellement en nous immergeant dans de nouvelles cultures. La Suisse nous manque beaucoup et nous sommes fiers d’y avoir vécu et étudié. Nous savons tout deux qu’un jour nous y retournerons ! » Merci les copains !

Envie de soutenir le projet Saucepan ou rencontrer nos deux entrepreneurs Simon et Wolfgang lors de votre prochain voyage à Shanghai ou lors de leurs prochaines vacances en Suisse ? N’hésitez pas à les contacter ! Ils seront heureux d’échanger et de vous faire déguster leurs plats « prêts à cuisinier » qui feront avancer les papilles.

L’équipe rosti

Vous aussi, contribuez sur Rostigraben. Partagez cet article ou parlez-nous de vous et nous écrirons votre histoire qui fera avancer la Suisse. Envie de contribuer à faire tomber la barrière de rosti en nous aidant à traduire et diffuser cette histoire en anglais, allemand ou italien ? Contactez-nous.

À lire « Jonathan, joli parcours d’un battant qui court le monde »

À lire « Le Suisse du jour : Jean-Claude Biver, le messie des montres helvétiques »

#faisonsavancerlasuisse

    Comments are closed.