EPFL: Robots et enfants devraient désormais apprendre à écrire ensemble

• 4 mars 2015

Qui, de l’élève ou de la machine, enseigne à l’autre?

En montrant à un robot comment former les lettres d’un mot, des enfants améliorent leurs capacités d’écriture et gagnent de la confiance en eux. Le système, nommé CoWriter, a été développé par des chercheurs de l’EPFL.

Devant le robot, une petite fille aligne des lettres en plastique munies d’un QR code. Sur une tablette, l’humanoïde les reproduit en peinant, tout particulièrement lorsqu’il s’agit de faire la boucle du p. Avec bienveillance, l’enfant écrit le mot à son tour pour lui montrer l’exemple. Elle s’applique, afin que le robot puisse mieux s’en inspirer… sans savoir qu’en réalité, c’est elle qui améliore ainsi ses talents d’écriture. Des chercheurs de l’EPFL ont présenté ce nouvel outil pédagogique, dénommé CoWriter, hier, à la Conference on Human-Robot Interaction (HRI), le grand rendez-vous du domaine de la robotique interactive, qui se tient à Portland, USA.

Le programme se base sur le learning by teaching, un principe reconnu en pédagogie. Si un enfant éprouve des difficultés à écrire, il peut facilement perdre confiance, commencer à se renfermer, voire même désinvestir progressivement les processus d’apprentissage. Au final, tout son parcours scolaire risque d’en être affecté. Or, amener cet écolier à se mettre lui-même dans la peau d’un enseignant et transmettre ce qu’il sait à un pair peut lui procurer de la valorisation et lui faire regagner estime de soi et motivation. La bonne idée des chercheurs, c’est de mettre un robot dans le rôle du pair à qui l’on enseigne. «Il s’agit essentiellement d’en faire un outil au service de l’enseignant, un support qui se voit attribuer un nouveau rôle dans la classe: celui de « l’élève qui en sait encore moins que le dernier des élèves »», décrit Séverin Lemaignan, l’un des auteurs de l’étude.

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Ecriture maladroite

Les scientifiques ont développé des algorithmes d’écriture évolutive, qu’ils ont implémentés sur un modèle préexistant de robot – un humanoïde de 58 cm de haut, dessiné pour être d’un abord avenant et interagir avec les humains. Grâce à ces algorithmes, la machine peut tracer, sur demande, des mots de manière maladroite et les améliorer ensuite progressivement. Pour ce faire, la machine puise dans une large base d’exemples d’écritures manuscrites, qui lui permet de reproduire les erreurs typiquement commises par les jeunes enfants en apprentissage. Il est également possible de le programmer de telle sorte qu’il s’adapte aux difficultés particulières d’un élève, faisant, par exemple, des p à la limite du lisible, la forme se précisant au fil du travail.

Un bon accueil

Encore au stade du prototype, CoWriter a été utilisé dans des classes d’école primaire auprès d’une septantaine d’élèves de six à huit ans, puis en individuel avec un seul enfant de six ans à raison d’une heure par semaine pendant un mois. Le système a jusque-là toujours été très bien accueilli.

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Ces expériences ont essentiellement permis de tester le système d’un point de vue technique, ainsi que de vérifier que les algorithmes répondent aux sollicitations des enfants sur le long terme et proposent bien l’évolution d’écriture souhaitée. De nouvelles études plus poussées seront menées dans les mois à venir afin de mieux quantifier les bénéfices d’un tel programme: sa réelle efficacité sur le processus d’apprentissage et les progrès des élèves, le confort d’utilisation pour les enseignants, ou encore les possibilités d’application dans des domaines plus spécialisés telle que la logopédie.

CoWriter est une invention du Laboratoire d’ergonomie éducative (Chili Lab) de l’EPFL, en collaboration avec le Laboratoire d’algorithmes et systèmes d’apprentissage de l’EPFL (LASA) dans le cadre du NCCR Robotics.

Images de Alain Herzog

Article par Sarah Perrin – Mediacom / EPFL

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