La « politique de change », ou comment les banques génèrent d’énormes profits
Saviez-vous que plus de 500 milliards de dollars sont transférés chaque année d’un pays à l’autre par les migrants ? En Suisse, c’est 8 milliards de francs qui sont envoyés annuellement à l’étranger. Or pour chaque transfert, les banques retiennent environ 9% de la somme envoyée (moyenne mondiale). Il faut en effet compter entre 0,4 et 1,7% de frais dans la zone Euro et entre 4 et 18% – oui oui, vous avez bien lu ! – pour la plupart des pays d’Europe de l’est.
Et si on ne peut qu’être abasourdi par les frais, on les accepte quasiment toujours comme une fatalité à laquelle on ne peut échapper. Mais si on y regarde de plus près, on constate que, suivant le service utilisé, la destination et la banque choisies, les coûts des transferts varient de manière surprenante. Par exemple, si vous envoyez de l’argent en Afrique subsaharienne, c’est 12% de la somme envoyée qui peut être retenue lors du transfert, contre 8% pour l’Amérique du Sud ou 6 à 7% pour l’Asie. Et les frais varient du simple au double selon les services financiers.
Comment expliquer ces variations ? La réponse est simple : chaque entreprise applique un taux variable et retient une commission différente. Les banquiers appellent ça la « politique de change » ; une jolie façon de dire « frais cachés qui font mal au c… ». Car forcément, les banques se gardent bien de communiquer leurs taux de change défavorables en regard du taux du marché et ne font souvent aucun effort pour informer leurs clients des coûts liés aux transferts.
Comment trouver la meilleure offre ?
Comment perdre un minimum d’argent en évitant les services financiers les plus voraces ? Encore une fois, la réponse est simple : il faut comparer. Et c’est justement ce que propose la start-up vaudoise « TawiPay » qui entend bien lutter contre la politique abusive des banques en matière de transferts de fonds et tente de faire baisser les frais de transferts en forçant à la concurrence.
TawiPay offre un système de comparaison gratuit entre les différents services de transferts de fonds comme Western Union, MoneyGram et autres. Bref, le site permet de comparer les frais retenus lors de transferts et de choisir, parmi plus de 200 entreprises, la meilleure option en fonction de la durée du transfert et des options d’envoi et de réception.
De plus, TawiPay, c’est simple, rapide et fiable. Pour choisir la meilleure offre, il vous suffit de sélectionner les pays d’origine et de destination de votre envoi et d’indiquer le montant que vous souhaitez transférer. En quelques secondes seulement, TawiPay liste les différents services de transferts d’argent, du plus intéressant au plus gourmand, en se basant sur les données en libre accès de la Banque mondiale ainsi que sur leurs propres recherches.
Une envie de faire bouger les choses
Derrière ce site qui bouscule le marché des services de transferts de fonds, il y a deux frangins, François et Pascal Briod ainsi que leur ami de longue date, respectivement diplômés de HEC Lausanne en Business Administration et du Graduate Institute de Genève en Development Studies. Et leur combat contre les frais bancaires abusifs ne date pas d’hier.
C’est en 1998 que les frères Briod, alors âgés de 9 et 11 ans créent une association pour soutenir le développement d’un petit village au Cameroun. Mais le jour où ils décident d’envoyer la somme réunie via Western Union, ils sont ahuris par les frais de plus de 10% appliqués au transfert. Alors forcément, 15 ans plus tard, voyant que rien n’a changé, ils éprouvent toujours le même sentiment d’injustice et décident d’agir.
Avec le soutien de Laurent Oberholzer, lui aussi co-fondateur du projet, diplômé d’un master en mathématiques financières à l’EPFZ, les deux frères développent le concept de TawiPay et se présentent au Startup Weekend 2013 à Lausanne. Même si leur projet ne sera pas retenu par le jury, la détermination des trois gaillards est plus forte et six mois plus tard, ils lancent la première version de leur site. Beaucoup d’émulation dès les premières semaines et, en à peine deux mois, le site recense 25’000 visites.
Un combat pour plus de transparence et moins d’abus
En permettant une comparaison claire basée sur des informations transparentes, TawiPay garantit aux migrants le meilleur choix lors de leurs transferts d’argent. Et le site met ainsi les différents services de transferts directement en concurrence. L’objectif est bien sûr de diminuer les frais retenus afin que l’argent envoyé profite essentiellement aux personnes et aux pays en difficultés financières.
La Banque mondiale estime que si les frais de transferts diminuaient de 5% – un des objectifs du G8 –, les migrants recevraient quelques 16 milliards de dollars de plus par an. Rien que pour l’Afrique, qui subit la plus importante taxation, l’économie pourrait atteindre les 4 milliards de dollars.
Plus qu’un outil de comparaison, TawiPay ouvre la voie à une « politique de change » plus transparente, plus équitable, plus éthique, qui profite à tous.
L’équipe Rosti
Suivez-nous sur Facebook.
Vos réactions :
Technologie + altruisme: des entrepreneurs relèvent le défi Article suivant:
Helvetiq, start-top qui fait (re)découvrir la Suisse en s’amusant